La surveillance, c’est maintenant !

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6 avril 2015 Informations | Laisser un commentaire

Internet, qui était jusqu’alors qualifié par certains de zone de « non-droit », s’est transformé ces dernières années en zone d’exception législative.

Récemment, notre gouvernement a mis en place la loi de programmation militaire. Cette loi vise notamment à donner plus de pouvoirs aux forces de l’ordre, en leur permettant de bloquer des sites web, sans l’autorisation d’un juge. Depuis, les motifs de blocage se sont multipliés, allant jusqu’aux propositions les plus grotesques.

Internet leur semble si effrayant, qu’ils ont jugé nécessaire d’en ajouter une couche, avec une nouvelle proposition de loi. Elle porte le nom de loi relative au renseignement et a été présentée le 19 mars. Cette loi est censée renforcer le « renseignement » et légaliser « des pratiques actuelles (mais jusqu’alors illégales) des services secrets ». En procédure accélérée, évidemment. Était-ce pour surfer sur l’émotion soulevée par l’attentat contre Charlie Heobdo ? Quel pire honneur pour les victimes que de brandir leur propre mort en soutien d’une loi liberticide qu’elles auraient dénoncée de toutes leurs forces !

On pourrait s’inquiéter du respect de nos libertés, avec cette nouvelle proposition de loi. Il n’en est rien, puisque Manuel Valls l’a présentée avec le délicieux sous-titre « protéger dans le respect des libertés ». Pourtant, l’objet de cette loi est bien de permettre aux forces de l’ordre d’aller toujours plus loin dans la surveillance de la population française. Ses champs d’application, comme « la sécurité nationale » ou « la prévention des violences collectives » sont si vagues qu’ils laissent craindre une nouvelle loi liberticide, mise en place pour lutter contre le terrorisme — voire la pédopornographie (qui oserait aller contre ça ?) — et étendue ensuite abusivement, et sans contrôle législatif de surcroît. Les simples mouvements sociaux, ingrédients indispensables de toute démocratie, pourraient d’ailleurs dès le départ faire aussi partie de ces champs d’application.

Ainsi, nos policiers pourraient bientôt aisément poser des micros, épier nos perditions sur Internet, lire nos courriels ou encore casser le chiffrement de nos données personnelles. Comme dans le film Minority Report, nous pourrions être automatiquement déclaré(e)s suspect(e)s, juste en fonction de ce que dit de nous la surveillance dont nous ferions l’objet au quotidien.

D’après la proposition de loi, ce pouvoir sera dans les mains d’une seule personne. Au détriment du principe fondamental de la séparation des pouvoirs censée être appliquée en France, ce sera le Premier ministre qui le détiendra :

« Si une telle menace est ainsi révélée, le Premier ministre ou l’une des personnes déléguées par lui peut décider de la levée de l’anonymat sur les données, informations et documents afférents dans les conditions prévues au chapitre 1er du titre II du présent livre. »

Et en tant que Fournisseur d’Accès à Internet ? Et bien, nous serions tenus de contribuer à cette surveillance. En effet, cette loi a pensé à nous en prévoyant la mise en place de boîtes noires (qu’on peut aisément qualifier de mouchards) qui collecteraient toutes les métadonnées de nos abonnés. En permanence, et surtout de manière totalement opaque. Un État qui impose un outil pour avoir un accès permanent et non-contrôlable à une majeure partie des communications de ses citoyens est-il encore compatible avec la définition de démocratie ?

Si le projet de loi a soulevé de nombreuses critiques (y compris outre-atlantique), le conseil national du numérique s’est quant à lui dit « préoccupé par l’introduction de nouvelles techniques de renseignement, dont certaines peuvent confiner à une forme de surveillance de masse ». Voir également la Lettre ouverte aux traîtres de la République de Laurent Chemla, qui synthétise efficacement l’aberration du vote de cette loi, étant donnés tous ceux qui tirent d’ors et déjà la sonnette d’alarme.

Pourtant, et malgré la gravité d’une telle proposition, nos journaux télévisés semblent muets. Pour empêcher un tel dérapage, il est pourtant nécessaire que ça soit les citoyens eux-mêmes qui se fassent entendre.

Alors on fait quoi ?

Des photos de chats, des gifs animés, des contre-propositions, des articles de blogs, des vidéos, des remix, des affiches, des tracts, tout ce qui est bon pour prévenir ceux qui nous entourent de ce qui les attend. Il est également temps de rappeler à nos député(e)s qu’ils ont été élus pour défendre nos droits. Parlons-en autour de nous, sur Internet, dans la rue, en famille comme au boulot. Faire du bruit est notre plus grande arme pour ne pas les laisser faire.

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